« Max, ramène tes fesses en bas, les nouveaux voisins viennent d'arriver, tu dois voir le canon qui leur sert de fille! » Adrianós et sa classe légendaire. Il avait légèrement tendance à m'agacer lorsqu'il parlait de cette façon. Malgré cela, je le considérais comme un frère. En fait, légalement, c'était ce qu'il était pour moi. En effet, j'avais treize ans quand mes parents et ma petite sœur ont péri dans l'incendie de notre maison. Ceux-ci étaient les meilleurs amis des parents d'Adrian qui ont décidé de m'adopter lorsque je me suis retrouvé orphelin. Voilà donc comment je me retrouvais à vivre avec mon meilleur ami, un peu lourd parfois mais toujours présent pour moi. Au début, ça n'avait pas été facile mais aujourd'hui je me sentais comme chez moi chez les Sifákis. Adrian m'attendait au bas des escaliers, un immense sourire s'étalant sur son visage. « T'es vraiment un con, tu sais? Tu vas au moins lui laisser le temps de s'installer avant d'essayer de lui sauter dessus? » Au vu de l'expression qu'il affichait, il n'en avait visiblement pas l'intention. Adrian avait trois ans de plus que moi, soit dix-neuf ans à l'époque, et il avait également beaucoup plus d'expérience que moi en matière de filles. Et ce n'était pourtant pas faute d'avoir essayé de me convertir au culte qu'il vouait au sexe opposé. Non pas que j'étais intéressé par les hommes, non, loin de là. Je n'avais juste pas envie de me « jeter » sur la première venue comme il le faisait. Pour le reste, je prenais pas mal exemple sur lui. Bon, j'évitais de répéter à chaque fois les mêmes conneries que lui mais, souvent, je le suivais dans tous ses coups. Sans dire un mot, il m'attira vers la cour arrière, d'où l'on pouvait aisément voir ce qu'il se passait chez les voisins. C'est là que je vis sortir de la maison la plus belle créature que j'avais jamais vue. « Elle s'appelle Viktoría et elle a seize ans, comme toi. » me souffla Adrian. Je ne pus m'empêcher de sourire. J'observai un moment la dénommée Viktoría. Elle dégageait quelque chose qui me plaisait énormément. Tout à coup, je sentis comme une force surnaturelle qui me poussait vers elle. Il fallait que je lui parle. Sans vraiment contrôler mes mouvements, je me dirigeai vers le muret qui séparait nos deux cours et tentai d'avoir l'air détendu. « Ahem, salut! Je m'appelle Maxéntios. Mais bon, tout le monde m'appelle Max alors, euh... tu peux m’appeler Max. Enfin, si tu veux... » Ridicule. J'étais ridicule. Du coin de l’œil, je vis Adrian enfouir son visage dans ses mains d'un air dépité. J'avais honte, tellement honte. Notre nouvelle voisine me regarda un instant sans rien dire. Et cet instant me parut durer une éternité. J'attendais qu'elle éclate de rire mais elle n'en fit rien. Après quelques secondes, elle prit la parole, un sourire aux lèvres. « Enchantée, Max! Moi c'est Viktoría mais tu peux m'appeler Vik. Enfin, si tu veux... » À ces mots, elle ajouta un clin d’œil malicieux. Je crus un instant que mon cœur s'était arrêté de battre. Mes mains étaient moites, mes jambes étaient devenues aussi molles que du coton. Je jetai un œil à Adrian qui semblait aussi déconcerté par la réaction de Viktoría que je ne l'étais. Mais très vite, il se reprit et vint se placer à côté de moi. « Enchanté, Vik! Je suis Adrian mais appelle-moi chéri ou mon petit cœur si ça te fait plaisir. » L'imbécile, il ne pouvait pas s'empêcher de faire le malin. Généralement, il suffisait qu'il ouvre la bouche pour déclencher les gloussements des filles qui l'entouraient. Hors, cette fois, Viktoría se contenta de hausser un sourcil sans prendre la peine de répondre. Puis elle reposa son regard noisette sur moi, m'adressa un sourire puis retourna à l'intérieur. Adrian ouvrit encore la bouche mais aucun son n'en sortit. Puis il me regarda d'un air hébété. Visiblement, la réaction de notre nouvelle voisine ne lui avait pas vraiment plu. « On dirait que ton charme ne marche pas sur elle. » « La ferme, Maxentiós. » Ce sur quoi il rentra, me laissant seul dans la cour, une satisfaction ultime comme unique compagnie. Et il me sembla que les semaines suivantes s'annonçaient plutôt réjouissantes.

uc.

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